Statut et grille des conservateurs : des avancées, des blocages et des oubliés

L’administration aimant bien se prendre pour le père Noël, le décret réformant le statut des conservateurs et celui modifiant la grille indiciaire ont été publiés au Journal officiel le 24 décembre 2021, soit plus de deux ans après une première discussion avec les organisations syndicales en juillet 2019.

Ces décrets reprennent des modifications demandées par les organisations syndicales et constituent donc des avancées, qui sont donc enfin actées en droit, et dont beaucoup de collègues bénéficieront. Certaines de ces avancées auraient pu et auraient dû être apportées dès 2013 et on est encore trop loin des conditions réservées au corps des architectes-urbanistes de l’Etat et encore plus de celles des administrateurs civils, sans que rien ne le justifie, si ce n’est des hauts fonctionnaires du Ministère de la Culture qui s’estiment trop mal payés (cf. la dernière note de la Cour des Comptes sur notre beau ministère), mais qui sont visiblement peu motivés pour porter notre cause auprès de la direction générale de la fonction publique.

Les premières avancées concernent le déroulement de carrière, bien que l’administration y ait consacré peu de temps lors des discussions préparatoires et ait écarté toute autre avancée lors du comité technique ministériel.

– En premier lieu, le SNAC-FSU a demandé et obtenu la création d’un huitième échelon de la classe normale. Outre que cela bénéficiera à certains collègues bloqués depuis trop longtemps au septième échelon et qui vont être automatiquement reclassés dans ce nouvel échelon (et gagner au passage 38 points d’indice majorés), cela renforcera l’attractivité du corps vis-à-vis des collègues d’autres corps susceptibles de devenir conservateurs par le tour extérieur et qui doivent ensuite attendre quatre ans avant d’être promouvables, même s’ils se retrouvent au dernier échelon de la classe normale.
– En deuxième lieu, le SNAC-FSU et les autres organisations syndicales ont obtenu un échelon supplémentaire dans la grille des conservateurs en chef et donc la possibilité d’atteindre le hors-échelle B.
– Enfin, l’administration a créé un dernier échelon pour le généralat, mais le dénomme échelon spécial et le réserve à ceux ayant exercé des fonctions, dont la liste n’est pas encore arrêtée, mais dont on peut douter qu’elle inclue toutes celles comportant de lourdes charges d’encadrement.

Par ailleurs, tous les échelons dans l’échelle bénéficieront d’une revalorisation indiciaire, de onze points en classe normale, et de vingt-six à trente-et-un points en classe en chef. Il est étonnant que cette revalorisation voulue par l’administration n’ait pas conduit à la suppression du cinquième échelon de la grille des en chef, qui est bloquée au maximum de la grille dans l’échelle et n’apportera donc plus que neuf points d’indice de plus que le quatrième échelon revalorisé.

Le décret réformant le statut apporte des modifications demandées depuis longtemps (mais l’administration en a bloqué certaines).
– En premier lieu, l’article sur les missions des conservateurs a été reformulé, afin de mieux exprimer leur rôle d’expert des patrimoines.
– En deuxième lieu, l’obligation de mobilité n’interviendra plus que pour la promotion au généralat : les jeunes collègues ayant décidé de s’investir dans leur première affectation ne seront plus écartés des listes de promouvables au grade d’en chef.
– Les conservateurs territoriaux ou de la ville de Paris ne devront plus justifier auprès de la CES de leurs compétences, s’ils candidatent pour un poste ouvert dans leur spécialité.
– Les collègues de catégorie A souhaitant intégrer le corps des conservateurs pourront enfin compter dans les dix années nécessaires celles qu’ils auront passées en collectivité territoriale. Réservée aux fonctionnaires, cette voie d’entrée continuera hélas à écarter les contractuels des établissements publics, dont ceux de l’INRAP, qui n’ont toujours pas la possibilité d’être titularisés.
– Une épreuve adaptée aux titulaires de doctorat devrait être mise en place, avec en outre une bonification d’ancienneté de deux ans, mais sans que cette bonification soit élargie aux conservateurs en poste. En revanche, l’administration a rejeté la demande unanime des organisations syndicales visant à ce que le diplôme minimal requis pour passer le concours soit le master, alors que dans les faits un étudiant titulaire de licence n’a pas le niveau pour exercer les missions d’expertise scientifique mentionnées dans l’article 2 du décret portant statut.

Une part importante des discussions a porté sur la commission d’évaluation scientifique. Sa composition ne figure plus dans le décret mais dans un arrêté publié en même temps que les décrets. La spécialité PSTN n’y comprendra plus qu’un membre élu et un membre nommé et la composition de la CES passe donc de vingt à dix-huit membres titulaires. En outre, l’administration pourra écourter ou prolonger de douze mois le mandat de la commission. Le mandat de la précédente CES étant achevé et la composition en ayant changé, une nouvelle CES doit bientôt être élue. Les listes doivent être constituées par spécialité et comprendre pour chacune deux candidats titulaires et deux candidats suppléants.

Un gros bémol à toutes ces avancées : elles ne concernent que les conservateurs du corps d’Etat. Nos revendications concernant les conservateurs territoriaux ont été repoussées aux calendes grecques, à d’éventuelles discussions avec le ministère de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Autant dire que le combat n’est pas encore gagné pour que les conservateurs territoriaux puissent enfin connaître le grade de conservateur général et les avancements d’échelons indiciaires que nous venons d’obtenir. Le ministère aurait pourtant tout intérêt à construire ainsi des passerelles, qui inciteraient certains conservateurs généraux à poursuivre ou à finir leur carrière en collectivité.

Imprimer cet article Imprimer cet article